Les raids de la coalition arabe menée par l'Arabie saoudite se sont étendus vendredi 27 mars contre les positions rebelles chiites au Yémen. Une nouvelle offensive qui intervient quarante-huit heures après le lancement d'une opération militaire menée par l'Arabie saoudite, qui affirme vouloir faire face à une « agression » iranienne. Des avions de combat ont bombardé vendredi soir plusieurs sites militaires autour de la capitale du Yémen et dans le sud du pays, où la DCA est entrée en action, ont indiqué des témoins.
Les raids aériens ont pris pour cibles des rampes de lancement de missiles à l'aéroport international de Sanaa ainsi que des sites militaires à l'est, à l'ouest et au sud de la capitale yéménite, selon des habitants.
Avant l'aube vendredi, des raids de la coalition arabe ont visé des positions de la rébellion dans la région d'Arhab, au nord de Sanaa, la capitale, tuant 12 civils, selon des responsables du ministère de la santé contrôlé par les rebelles. Depuis le début de l'opération « Tempête décisive » jeudi, 39 civils ont péri dans les frappes, selon ces responsables. Ce bilan n'a pu être confirmé de source indépendante.
Trois autres frappes ont touché vendredi matin le complexe présidentiel, aux mains des rebelles au sud de Sanaa, ont indiqué des témoins. Des avions ont aussi bombardé une base militaire contrôlée par les houthistes dans la province d'Amrane, au nord de la capitale, ainsi que des dépôts d'armes dans le fief des rebelles à Saada (nord), selon des résidents.
La coalition – qui comprend notamment cinq pays du Golfe – avait affirmé jeudi que les bombardements se prolongeraient. Dans une conférence de presse, vendredi, son porte-parole, le général saoudien Assiri, a annoncé qu'elle avait neutralisé les capacités aériennes de la rébellion chiite des houthistes et de leurs alliés après deux jours de bombardements : « L'espace aérien est totalement sous contrôle des forces de la coalition. » L'un des buts étant d'empêcher tout acheminement d'aide de l'extérieur.
Combats dans le sud
Dans le sud du pays, un secteur où ils tentent de progresser pour étendre leur zone d'influence, les rebelles chiites et leurs alliés se heurtent également à des tribus sunnites. Au moins 21 houthistes ont été tués vendredi quand leurs véhicules ont été pris sous un feu nourri à Al-Waht, zone tribale à 15 km au nord d'Aden, selon un responsable local. Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrant plusieurs pick-up et un char en proie aux flammes.
Dans le grand port d'Aden, des accrochages opposaient rebelles et membres de « Comités populaires » anti-houthistes, selon des sources concordantes. Et au moins huit personnes ont été tuées dans des affrontements dans l'enceinte de l'aéroport. Dans la ville, la situation est chaotique. Des unités de l'armée ont abandonné leurs campements, laissant parfois des stocks d'armes à la merci de pilleurs, ont indiqué des habitants.
Interrogé sur le risque que les rebelles chiites prennent le contrôle d'Aden, dont le président Abd Rabbo Mansour Hadi a fait sa capitale provisoire après « l'occupation de Sanaa », le porte-parole saoudien de la coalition a répondu : « Nous ferons ce qui est nécessaire pour protéger la légitimité » au Yémen.
Vifs échanges entre l'Arabie saoudite et l'Iran
L'intervention militaire de la coalition arabe a été condamnée jeudi par le chef des rebelles, Abdel Malek Al-Houthi, qui a dénoncé une « invasion » et averti que les « Yéménites n'allaient pas rester sans réagir ». L'Iran a de son côté mis en garde contre une propagation du conflit, son président Hassan Rohani dénonçant une « agression » contre le Yémen. « Les Iraniens sont ceux qui s'ingèrent dans les affaires des pays arabes, que ce soit au Liban, en Syrie, en Irak et au Yémen, ce que nous ne pouvons pas tolérer », a rétorqué l'ambassadeur saoudien à Washington, Adel Al-Jubeir, sur la chaîne américaine Fox News. « Nous devons faire face à l'agression de l'Iran » qui veut « dominer la région ».
Vendredi soir, c'est le chef du Hezbollah libanais, soutenu par l'Iran, qui s'en est pris à Riyad dans un disours retransmis par la télévision de son mouvement : « L'issue de cette bataille est claire: l'Arabie saoudite sera vaincue et le peuple yéménite remportera une victoire incontestable », a déclaré Hassan Nasrallah.
En pleines négociations sur le nucléaire avec Téhéran, les Etats-Unis – et le Royaume-Uni vendredi soir – ont annoncé « un soutien logistique et de renseignement » à l'opération. La Maison Blanche s'est déclarée inquiète des « activités iraniennes » au Yémen, parlant d'informations sur « le transfert iranien d'armes » dans ce pays.
L'ex-président appelle à un cessez-le-feu
Rallié à la rébellion houthiste, l'ex-président yéménite Ali Abdallah Saleh a appelé, lui, à un cessez-le-feu dans les opérations militaires en cours et a proposé de tenir aux Emirats arabes unis un dialogue entre les protagonistes. M. Saleh propose aussi « une reprise du dialogue (...), sous le parrainage de l'ONU, et son transfert aux Emirats arabes unis ou dans un bâtiment de l'ONU » en vue d'un règlement négocié de la crise yéménite.
Alliée à l'Arabie saoudite, l'Egypte abrite à partir de samedi à Charm El-Cheikh le sommet annuel de la Ligue arabe, qui sera dominé par le projet de création d'une force militaire arabe, qui a bénéficié d'un coup d'accélérateur avec l'intervention au Yémen.